(Le Quotidien) – Présentement à Dakar, avec des amis américains venus pour découvrir le basket sénégalais, le coach des Lions s’est confié au journal Le Quotidien. Sur ses projets, l’avenir des jeunes qui s’expatrient, sur la retraite de son capitaine Gorgui Sy Dieng… Ngagne Desagana Diop fait «panier plein».

Qu’est-ce qui explique votre séjour à Dakar ?
Je suis venu avec mon ancien coach lorsque j’étais au collège, aux Etats-Unis, en 1999. Il est resté longtemps là-bas. Aujourd’hui, c’est le coach principal. On a gardé de très bonnes relations jusqu’à aujourd’hui. Son rêve était de venir au Sénégal. Malheu­reusement, pendant des années, on ne pouvait pas le faire. C’est seulement cette année que j’ai pu avoir du temps libre. Il en est de même pour lui et on a décidé, avec quelques amis aussi, d’organiser ce voyage. Ce n’est pas facile d’avoir du temps libre aux Etats-Unis. C’était donc l’occasion de lui faire découvrir le Sénégal, mais aussi de visiter certains centres de basket.

Qu’est-ce que vous avez pu faire depuis que vous êtes là ?
On est allés à Seed Academy à Thiès lundi. On a pu faire quelques séances avec les pensionnaires et les coaches. C’étaient de bons moments d’échanges et de partage, et ils ont beaucoup apprécié.

Aujourd’hui (mardi), on est venus à Bopp pour la même chose. On ira ensuite voir les équipes de la Jeanne d’Arc et de Mermoz. Je suis un peu lié à ces centres, c’est la famille. J’ai des amis dans certains centres. Du coup, c’était normal de leur faire découvrir ces centres. Ils ont été impressionnés par le physique, la vitesse des jeunes, même s’ils notent quelques déchets techniques. Je leur ai fait comprendre qu’au Sénégal, dès la naissance, l’enfant joue d’abord avec un ballon de football, avant de choisir plus tard le ballon de basket. Con­trai­rement aux Américains où l’enfant découvre le basket très tôt.

Est-ce que vous avez des projets ensemble à mettre en place au Sénégal ?
Je crois que c’est possible. Ils ont beaucoup apprécié le séjour. Ils ont eu l’occasion de visiter l’île de Gorée, le Lac Rose… Ils ne connaissaient rien de l’Afrique. Les gens sont souvent étonnés lorsqu’ils découvrent le continent. Ils souhaitent revenir chaque année avec d’autres projets et programmes pour les jeunes basketteurs, alors qu’ils ne sont là que depuis trois jours. Maintenant, penser à un centre, ce n’est pas encore dans mes plans, mais on ne doit jamais dire jamais. Juste qu’avec le travail aux Etats-Unis, ce n’est pas évident de se lancer dans certains projets. Il faut du temps pour pouvoir faire les choses correctement. Mais c’est possible. Ce sont des gens qui sont prêts à aider, à accompagner le basket sénégalais, autant sur le plan matériel que financier. J’ai pensé être président d’un club, mais on verra. Il faut d’abord tout mettre en place, avoir des hommes de confiance qui peuvent gérer, sachant qu’on n’est pas sur place. Voilà tous les éléments qu’il faut d’abord régler avant de se lancer dans ce genre de projet. Mais on verra à l’avenir.

En tant qu’ancien basketteur qui a eu l’opportunité d’évoluer sur place avant de partir aux Etats-Unis, comment vous voyez l’évolution du basket local ?
Je suis parti à 16 ans. Aujourd’hui, avec les académies, les jeunes partent très tôt. Je crois que c’est à ce niveau que se situe le problème. Je ne dis pas que les jeunes ne doivent pas s’expatrier, mais on doit davantage travailler sur les fondamentaux avant que les jeunes ne partent. On a de très bons coaches, mais c’est au niveau des fondamentaux qu’on doit travailler davantage. Cela leur permettra de s’adapter rapidement en Europe ou aux Etats-Unis.

Mais quand les infrastructures et les moyens manquent…
Effectivement ! D’ailleurs, mes gars étaient surpris quand ils ont vu le terrain de Bopp. A Seed, c’est une salle fermée, mais à Bopp, c’est en plein air. Il y a des salles partout aux Etats-Unis. Il faut que l’on revoie les infrastructures. On espère qu’avec le nouveau régime, les choses vont changer. Même avec l’Equipe nationale A, c’est un problème de disposer d’une bonne salle. C’est ce qui explique que les jeunes ne sont pas adroits. Ce n’est pas compliqué d’avoir des salles fermées dans ce pays.

Il faudrait pour cela que des anciens comme vous puissent poser le débat…
A chaque fois qu’on a l’occasion d’en parler, on le fait. Avec le président de la Fédération (Me Babacar Ndiaye), avec Amadou Gallo Fall et certains anciens joueurs, on en parle souvent. Si aujourd’hui, on est reconnu, c’est grâce au basket. A nous de porter le combat pour que les choses changent. On a beaucoup d’espoir avec le nouveau régime. On prie pour que leur vœu pour le pays puisse se réaliser. Il faut aider le basket à se développer. On joue au basket partout au Sénégal, même sous le soleil et sur des terrains en plein air. Si les pratiquants et les infrastructures sont dans les meilleures conditions, cela va beaucoup aider la discipline.

Parlons de votre équipe, les Westchester Knicks, en G-League, qui a été sacrée championne cette année. Qu’est-ce que ce titre représente pour vous dans votre jeune carrière d’entraîneur ?
Je rends grâce à Dieu. C’est le fruit d’un long travail. La première année n’a pas été facile. Cette année, on a eu de très bons joueurs et Dieu a fait qu’on a gagné à la fin. Le rôle du coach est important, mais il devient plus facile lorsqu’on a des joueurs qui respectent et suivent les consignes. J’avais des gagneurs cette année et ils m’ont beaucoup facilité la tâche. On rêve de ces moments quand on devient coach.

Avec ce titre, est-ce que vous aspirez à rejoindre une équipe de la Nba cette année ?
Je m’étais donné deux à trois ans en G-League. J’y suis allé en 2022, alors que j’avais un contrat à Houston. Mais je voulais apprendre et je ne regrette pas mon choix. On verra maintenant à mon retour, ce que l’avenir me réserve. S’il y a une opportunité qui se présente, je veux bien rejoindre une équipe de la Nba. Je ne souhaite pas y retourner juste pour y retourner. Je veux un vrai challenge pour continuer ma progression. A défaut, je peux rester en G-League encore une année. Je suis en contact avec mon agent et on prendra la bonne décision le moment venu.

Est-ce que c’est facile pour les techniciens africains d’intégrer les équipes de la Nba ?
La philosophie des Amé­ricains est simple : tu mérites le poste, on te le donne. Ils ne perdent pas de temps à voir d’où tu viens ou ta nationalité. On ne m’a pas nommé coach en G-League parce que cela leur fait plaisir. Il faut travailler et mériter le poste. Si je veux rejoindre une équipe de la Nba, je dois continuer à travailler.

On voit beaucoup de jeunes coaches en Nba. Qu’est-ce qui explique cette tendance ?
Le basket a changé. Il faut pouvoir se connecter avec les joueurs. Il y a bien sûr des anciens, mais la donne a changé. La connexion passe plus facilement avec les jeunes.

Justement, comment ça se passe pour les jeunes basketteurs sénégalais qui sont un peu partout aux Etats-Unis ?
Ça se passe bien. Le jeune qui est à Atlanta, Mouhamed Guèye, est très intéressant. Malheureusement, il n’a pas beaucoup joué cette année à cause des blessures. Il y a de l’espoir. Je connais son coach. On discute beaucoup du potentiel du gamin. Il y a Georges (Niang) qui n’a pas encore la chance de rejoindre la sélection. On a de très bons rapports et il a envie de venir en sélection. J’ai eu la chance de le coacher à Utah. On a prévu de faire quelque chose avec la sélection pendant les vacances. J’espère que cette fois-ci, il sera là et pour l’Afrobasket en 2025. Il y a d’autres jeunes joueurs comme Ndongo Ndiaye. C’est Makhtar Ndiaye qui s’en occupe et il est en train de les suivre.

La transition est toute trouvée pour parler de l’Equipe nationale masculine dont vous êtes le coach. Vous avez été absent lors du tournoi de pré-qualification aux Jeux Olympiques, à Lagos en août dernier, pour raisons de santé. Ça va mieux maintenant ?
Oui, ça va beaucoup mieux maintenant. J’ai subi une opération au niveau de la jambe. Je ne pouvais le faire que pendant cette période. Dieu merci, tout s’est bien passé.

Alors, qu’est-ce qui est prévu cette année avec la sélection ?
J’ai rencontré le président de la Fédération et je lui ai soumis un programme durant les vacances. On ne peut pas rester sans rien faire pendant cette période, même s’il n’y a pas de compétition. Après la Summer League, on a prévu de se regrouper pendant deux semaines à Dakar. On est en train de négocier des matchs amicaux avec la Tunisie et le Maroc, toujours à Dakar. Cela va nous permettre de préparer la fenêtre de novembre.

Est-ce qu’on peut s’attendre à voir de nouveaux joueurs pendant cette période ?
On va ouvrir la liste. Il y a beaucoup de jeunes joueurs. Les places sont chères. Il va falloir que chacun se donne à fond pour prétendre être dans l’équipe.

Ce sera malheureusement sans Gorgui Sy Dieng. Comment avez-vous accueilli sa décision de prendre sa retraite internationale ?
J’ai été très surpris par sa décision. Je crois qu’il peut encore jouer quelques années. Il peut apporter beaucoup à l’équipe. On en a discuté, maintenant c’est son choix. Il connaît son corps mieux que tout le monde. Mais c’est dommage pour nous parce que c’est un leader qui a beaucoup donné à la sélection. Dommage qu’il décide de partir et de se consacrer à autre chose. On lui souhaite bonne chance dans ses projets. Avec la sélection, il est temps qu’on regagne un autre titre. Cela ne sera pas facile en Angola. On aurait aimé jouer à domicile, mais on donnera tout pour décrocher ce trophée, Inchallah. Les autres travaillent beaucoup, à nous de travailler plus qu’eux pour redevenir la meilleure Nation africaine.

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source : Le Quotidien

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