3 Janvier 1975, à l’aéroport de Dakar-Yoff, de nombreuses personnes sont venues accueillir une délégation sportive.  L’événement est inédit.  En général, une telle foule est mobilisée habituellement lors d’une visite de monarque ou de Chef d’Etat, fait assez fréquent dans les jeunes années de la République.  Mais cette fois, il s’agit de l’équipe nationale féminine de basket, les lionnes qui viennent de remporter pour la première fois le titre de champion d’Afrique.

Les autorités politiques de l’époque  , notamment le ministre chargé des Sports Joseph Mathiam et la première femme ministre dans un gouvernement sénégalais Caroline Diop, sont aux premières loges pour accueillir les championnes. Bonaventure Carvalho, le célèbre coach, « père  » de cette sélection et ses « filles » avaient  déjà, à leur palmarès deux succès aux Jeux africains de 1965 de Brazzaville et ceux de 1973 à Lagos.

Mais, le Sénégal n’avait pas encore gagné le titre de champion d’Afrique chez les dames. Les trois compétitions déjà  disputées étaient revenues à l’Egypte (deux fois) et à Madagascar (une fois). La quatrième ayant été annulée.  Au 5e championnat continental programmé à Tunis, dans la dernière semaine du mois de décembre 1974, les basketteuses sénégalaises réussissent  un exploit retentissant en s’imposant en finale face aux Tunisiennes (47-44) soutenues par un public estimé à cinq mille spectateurs.  A ce sujet, la capitaine de l’équipe nationale, Marie Amélie Lopez  avait déclaré au magazine Champion d’Afrique (numéro 12, janvier-février 1975) :    »  Nous aurions préféré jouer contre n’importe quelle autre formation  plutôt que celle de la Tunisie.  Nous craignions de craquer devant ce public qui soutenait bruyamment la formation locale. Pour la première fois, nous avons eu réellement peur de perdre . Alors qu’au premier match contre la Tunisie, la marge était de vingt points , en finale, elle n’a été que de trois points. »

Les héroïnes de ce premier succès des lionnes dans la compétition appelée plus tard Afrobasket sont dans l’ordre alphabétique : Mareme Ba, Kankou Coulibaly, Awa Dia (décédée, il y a quelques années), Coura Dia, Nafissatou Diagne, Mame Penda Diouf, Henriette Dior, Ndeye Lo, Marie Amélie Lopez (2e meilleure réalisatrice du tournoi avec 93 points). Marie Hélène Lopes Ndiaye, Angélique Niang et Rokhaya Pouye.   Le coach adjoint à  Bonaventure Carvalho est Ibrahima Diagne Busnel.

Le temps est passé mais le souvenir de cette victoire reste vivace chez certaines de ces pionnières.  Marie Hélène Lopez Ndiaye se rappelle de la finale.   » L’issue du match était incertaine.  Vers la fin, Bona avait demandé un temps mort et nous avait recommandé de faire tourner la balle. Mais me fiant à mon adresse, j’avais tenté un tir que je ne transformai pas. Heureusement que nous avions pris le rebond et nous avons tenu la balle jusqu’à la fin. »  Enfin, témoigne t-elle, ce match crispant pour les lionnes a été remporté grâce à l’entraîneur qui était également un fin  psychologue.  Pour le début du match, il avait instruit à ses joueuses par exemple de ne pas pénétrer sur l’aire de jeu avant les Tunisiennes mais d’entrer en même temps que leurs adversaires.  Il craignait que le chahut des supporters locaux ne perturbe les joueuses et les déconcentre. 

Ces héroïnes qui ont ouvert la voie à leurs cadettes  et inauguré la série des onze victoires des lionnes  dans cette compétition et dont certaines ont gagné d’autres titres après , méritent bien de la nation.   Elles ont droit à un hommage, cinquante ans après.  L’Association nationale de la presse sportive (ANPS) a bien fait les choses, en les  honorant ,  le 7 décembre dernier lors de son Gala annuel,  en remettant un trophée à la capitaine Marie Amélie Lopez.      

Mamadou KOUME 

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